mercredi 18 juin 2014

Les auteurs auto-édités : des artisans de l'écriture



Il y a ce mouvement qui s'est emparé de la toile, celui des "auteurs auto-édités". Avec son lot de difficultés, et sa concurrence rude, c'est la guerre des plumes (rien à voir avec celles du moulin rouge).

"Pourquoi s'auto-éditer ?" me direz-vous. Pourquoi ne pas adresser le manuscrit aux grandes maisons d'édition, payer un prix conséquent pour envoyer 30 exemplaires, ouvrir en retour des courriers de refus "votre manuscrit ne correspond pas à notre ligne éditoriale, nous sommes désolés de ne pouvoir y donner suite blablabla... bonne chance blablabla...."

Maintenant, les éditeurs ont fait le choix de ne pas prendre de risque avec les auteurs : trop difficile de vendre des milliers et des milliers de livres d'un seul auteur, il faut assurer sa promo, l'envoyer chez Laurent Ruquier samedi soir, et s'il reste une place l'envoyer aussi à la grande librairie sur France TV.

Bref, beaucoup de temps et d'argent pour un seul auteur. Un pari bien trop risqué. Un gros boulot pour eux. Et les auteurs auyo-édités sont des milliers avec leurs histoires. Les éditeurs ont pris le pli de les surveiller de loin, et si jamais un auteur sort du lot sur Amazon, alors oui, on lui proposera un contrat.

Pas d'autres solutions que de travailler deux fois plus dur qu'un auteur "sélectionné" par une maison d'édition. Lui, il envoie son fichier, puis toute la machine se met en route à sa place, correction, mise en page, remaniement, mise en place d'une couverture par le service graphique, tirage d'une épreuve, communication... L'auteur peut se consacrer à la rédaction d'un autre ouvrage, en toute tranquillité, et se laisser... porter.

Les petits auteurs auto-édités sont des autodidactes qui doivent se porter, se supporter seuls, ils doivent tout faire.

Bon nombre de mes amis ou même des membres de ma famille, ne savent pas ce qu'est un auteur indépendant, et s'étonnent de ne pas voir le nouveau bouquin à la Fnac ou... à Auchan avec le dernier Amélie Nothomb.

D'abord, on écrit son bouquin. Ce qui est (plus ou moins) facile. Là, au moment de se lancer dans l'aventure, on prend des conseils et des leçons d'écriture, sur Internet, ou dans des ouvrages précis, comme celui de Stephen King. On évite les pièges, on apprend les trucs pour essayer d'intéresser, puis captiver, et retenir le lecteur jusqu'au bout. Impossible d'écrire un livre plat, en tout cas c'est déconseillé.
On est content de son résultat, on a écrit son premier livre. Super.
On cherche à l'imprimer, chez un imprimeur, ou sur une plateforme d'Internet.
Avant ça, il faut le corriger. Gros boulot. Les autres ne peuvent pas vous aider, ils ont leur vie et pas de temps à vous consacrer. Donc système D. Logiciel spécifique. Réflexion pour batailler avec le programme qui vous suggère une erreur possible alors que vous, vous êtes sûr de votre coup. Polémique : "homme vs logiciel". Vérification dans le Bescherelle : JE gagne.

Puis remanier son livre, juger que tel paragraphe est plat, et qu'il n'apporte rien à l'intrigue. Au contraire, intensifier l'émotion c'est toujours bon. Rester subtil, ne pas être lourd.
Ensuite, on le met en pages comme on peut.
On l'envoie à l'imprimeur, on reçoit son épreuve, on se rend compte qu'il n'est pas paginé comme il faut, qu'il y a des erreurs sur la couverture. Oups.

Finalement, vous vous apercevez que vous passez plusieurs semaines à faire tout ce boulot, correction, impression. Vous êtes découragés par tout ce temps passé. Parce que ce que vous adorez par dessus tout, vous, c'est écrire. Là, vous n'écrivez plus, sauf dans votre tête où vos futurs personnages trépignent. Attendez les gars, pas le temps.

On diffuse son livre, on fait des choix, mauvais ou non, seule l'expérience nous dira si ce que nous avons entrepris est bien. On a lu de nombreux blogs liés aux conseils de diffusion et d'auto-éditions, comme par exemple le blog "le souffle du numérique" qui est très bien fait, ou celui de Lise Journet une auteure de SF sur Amazon qui est très bon aussi. Puis, on essaie de voir si on peut le déposer dans telle librairie du coin, pour toucher des lecteurs locaux quand même, car nous ne serons jamais dans les catalogues des réseaux Dillicom ou Décitre, donc désolée, chère famille et chers amis, mais nous ne pourrons pas être dans votre caddie à Auchan ou Carrefour.

On le fait savoir à nos réseaux sociaux, on envoie des mails de la parution de l'ouvrage (à n'envoyer que quand on est sûr que son BAT est ok sinon nos lecteurs commandent eux aussi... des erreurs. Sic.).

Et après on se lance dans l'aventure de la commercialisation et de la communication pour informer les lecteurs inconnus que notre livre est "exceptionnellement super" et qu'il vaut le coup alors qu'il est en ligne parmi des dizaines de milliers de titres, entre le dernier Stephen King et la lecture sulfureuse des cinquante nuances de grey...

Et là, les lecteurs se méfient de vous, normal, ils ont pas envie d'acheter une daube insipide bourrée de fautes, ou un bouquin qui traite de votre opération de l'appendicite qui s'est mal passée... ça se comprend. Ils attendent que la mayonnaise prenne, que vos ventes augmentent, que vous remontiez du tréfonds du classement d'Amazon, pour être juste en place 10 000, cool, le tout c'est qu'il faut bien que quelqu'un commence à vous lire... c'est le début du cercle infernal.

En résumé, voila notre boulot, donc pour tout mettre sur la carte de visite, ça va être compliqué :

- Ecrivain, auteur, conteur, puis :
- Correcteur
- Pagineur, spécialiste du remaniement personnel (on pourrait même faire celui des ministères), et auto-censeur à ses heures,
- Editeur, grand maître de l'ISBN, déclaration BNF, protection droits d'auteur (pas le droit à la SACD, à la limite la SDGL mais faut voir, alors je choisis le système D...)
- Commercial, VRP, vendeur, vous faites un audit sur la concurrence et vous lisez les blogs des autres aussi, vous suivez l'actu littéraire, et vous regardez Ruquier. Normal, on étudie le marché.
- Comptable avec notions fiscalités : pour déclaration au fisc américain le fameux W-8BEN (rien à voir avec R2D2), et chez les français déclaration des BNC.
- Agent littéraire (relations publiques et communication, penser à rencontrer journal local)
- Diffuseur, stratégies prix attractifs, promotions etc.
- Coursier, faut aller le poster, quelqu'un vous en commande un, via un site de vente.

Des sites proposent désormais des regroupements d'auteurs auto-édités pour faciliter les démarches de corrections ou de communication pour adresser à des milliers de lecteurs potentiels l'information de nouvelles lectures. Il y a le groupe des auteurs auto édités sur Facebook et le site dédié créé par Bruno Challard (il a créé aussi un concours 2015 de romans auto édités toujours en cours), et il y a nouvellement le site Scribay.
Un dernier conseil si vous vous lancez dans l'aventure de l'auto édition réfléchissez bien avant de signer avec un des éditeurs nombreux sur la toile et qui veut vous éditer "à compte d'auteur", vous y laisserez de l'argent. Prenez conseil plutôt sur les 2 sites précités avec des auteurs qui ont déjà cette expérience pour savoir quelle est la meilleure formule qui vous convient.

En conclusion, les "artisans auteurs auto-édités, autodidactes et autonomes" attendent lecteurs, mêmes profils, courageux et adeptes de la première chance. Il faut bien que quelqu'un goûte pour la première fois ces "petits pains littéraires", pour y revenir après, et en parler autour de soi, dire à son entourage que le "fait maison" par un inconnu, c'est aussi la qualité, même s'il y a une virgule en trop qui a squatté page 34, l'histoire n'en sera pas bouleversée...

Problème : où  sont les lecteurs ? Ils sont nettement moins nombreux qu'avant, alors que les auteurs augmentent considérablement...

Pour aller plus loin, demandons-nous ce qu'auraient fait les grands écrivains si personne ne leur avait permis d'être édités et imprimés ? 
"J'accuse" aurait-il existé ? Et l'encyclopédie ? N'étaient-ils pas eux aussi, les Zola, Diderot, les Camus, Flaubert, Balzac, Saint Exupéry et j'en passe, des artisans de l'écriture ? Et si les médias consacraient aussi un peu de temps ou d'espace dans leurs colonnes pour communiquer, non seulement sur l'actu des géants officiels de l'écriture, mais aussi sur le travail titanesque et confidentiel des fourmis que nous sommes ?

mardi 17 juin 2014

La critique est aisée mais l'art est difficile.

Un coup de gueule de ma part qui est paru dans le Nord Littoral, qui a déjà un an,
et qui est toujours autant d'actualité d'ailleurs.